Les chapelles de l'Yonne
 
 
     
Interviews
 

Le site des chapelles de l'Yonne donne la parole aux acteurs (associations, éditeurs, particuliers, ...) qui font vivre le patrimoine dans l'Yonne.

Vous trouverez dans cette rubrique les interviews de ces personnes.

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Paroles d'acteurs
         
 

Rémi Couvignou,
Responsable de "La Gazette 89 éditions"

 
 
Rémi Couvignou - La Gazette 89 éditions

Chapelles de l’Yonne : M. Couvignou, vous êtes responsable de la Gazette 89 éditions. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste votre activité ?

   Rémi Couvignou : En tant que maison d’édition, nous nous spécialisons dans la publication de brochures traitant de sujets spécifiques à l’Histoire et au Patrimoine du département de l’Yonne. Tous les titres sont rédigés par des spécialistes reconnus du sujet traité. Tout commence par une proposition faite par l’auteur lui-même ou par une sollicitation de notre part.
Une fois rédigé, l’ouvrage est édité (c'est-à-dire que nous travaillons avec l’auteur pour adapter le texte à l’esprit de la collection) puis imprimé à nos frais (nous ne travaillons pas « à compte d’auteur ») et enfin publié (mis à la disposition du public).La Gazette 89 éditions prend tout le risque éditorial à son compte et l’auteur reçoit ses droits d’auteur sur les ventes (quelles qu’en soient les quantités) après retenue, bien entendu, des frais sociaux obligatoires. (Sécu, CSG, etc).



Quels sont les ouvrages disponibles à votre catalogue ? Quels sont ceux en projet ?

   Rémi Couvignou : Nous avons sorti deux titres pendant notre première année d’existence, puis trois l’année passée et nous travaillons pour 2009 sur un planning de 5 ou 6 titres.
Nous avons publié un ouvrage sur la Chapelle Saint-Julien de Vauguillain, à Saint-Julien du Sault (par Philippe Makédonsky), puis un titre sur la légende d’Étigny, où « la bique a pris le loup » (par Pierre Glaizal), suivis d’une biographie d’un sculpteur né à Crain, Max Blondat (par Josiane Maxel) et d’une brochure sur les manifestations d’OVNI depuis 50 ans dans l’Yonne, compilation de témoignages d’évènements enregistrés dans la presse, dans des publications antérieures ou directement (par Rémy Fauchereau). Finalement, j’ai moi-même rédigé une brochure sur les avions alliés tombés dans le département entre 1940 et 1945.
Nous avons actuellement une dizaine de « fers au feu », à différents niveaux d’avancement. Je peux citer au moins les secteurs concernés : légendaire local, archéologie industrielle (2 titres), histoire médiévale, ovni, architecture religieuse, histoire des religions. Nous en saurons plus vers février/mars.


J’imagine que vous êtes sensible à la sauvegarde du patrimoine icaunais. Etes-vous en relation avec des associations de sauvegarde du patrimoine ? Font-elles appel à vous pour la publication de leur brochure ?

   Rémi Couvignou : Je ne travaille pas directement avec les associations. Celles-ci éditent généralement leurs propres publications et dans la grande majorité des cas avec compétence. Bien entendu, elles ne disposent pas des circuits de commercialisation d’une maison d’édition et c’est fréquemment sur ce point qu’elles sont déçues par le bilan final de l’opération.
Je travaille directement avec des auteurs. J’étudie si la publication envisagée possède un public potentiel suffisant pour amortir le tirage et dégager une marge bénéficiaire. Il est évident que lorsque l’auteur est membre d’une association, il y a automatiquement un public potentiel. Mais si l’association compte seulement 30 membres et que le sujet est définitivement trop « local », je dois abandonner le projet car, je me permets de le rappeler, nous sommes une entreprise qui travaille sur ses fonds propres et en fin d’année il y a un bilan à équilibrer. 300 exemplaires est une estimation minimale du nombre d’exemplaires à vendre de chaque titre.


De nombreuses chapelles dans l’Yonne sont laissées à l’abandon ou manquent cruellement d’entretien. Selon vous, quels sont les moyens possibles pour agir concrètement et sauvegarder ces édifices ?

   Rémi Couvignou : Notre pays compte plus de 36000 communes. Chacune d’entre elles comprend au moins un édifice religieux en activité et fréquemment une chapelle, parfois deux ou trois. Il y a donc un minimum « minimorum » de 72000 édifices religieux en France, mais ce nombre est plus probablement situé entre 100 000 et 150 000. Pour l’Yonne, 456 communes donc au minimum 900 édifices, chapelles incluses.

Chapelle Didout - La Celle-Saint-Cyr
Les églises appartenant aux communes doivent être entretenues par celles-ci. Peut-on exiger des pouvoirs publics la prise en charge de tous les bâtiments religieux existants ? Impossible, tant sur le plan légal (séparation des églises et de l’État) que financiers (augmenter les impôts locaux ?). Il ne reste à mon sens que le secteur privé, par le biais du mécénat culturel. Une chapelle présentant un réel intérêt artistique, architectural ou culturel doit pouvoir être prise en charge par une association avec la collaboration financière d’une entreprise locale et en accord avec la municipalité. Mais l’on doit avoir conscience qu’à tout instant le désistement de l’une des trois parties (crise financière pour l’entreprise, changement d’orientation politique pour la municipalité, mise en sommeil de l’association) peut faire retomber le bâtiment dans un état d’abandon… Reste alors la propriété privée, en espérant que l’acheteur préservera le bien en l’état (aucune loi ne l’y oblige) et en laissera l’accès (même intermittent) au public…

 

La moyenne d’âge des adhérents des associations de sauvegarde est assez élevée et cela va, à terme, poser de gros problèmes pour certaines d’entre elles. Pensez-vous que les nouvelles générations soient impliquées dans la sauvegarde du patrimoine ? Quels seraient les moyens à mettre en œuvre pour accroitre cette sensibilité ?

   Rémi Couvignou : Je ne pense pas que les plus jeunes générations soient moins impliquées que les autres. Au contraire, dirais-je ! Certaines associations sont ouvertes à ces jeunes qui y sont bien accueillis, qui peuvent s’y exprimer, à qui l’on confie des responsabilités et qui donc participent en apportant des idées neuves. Je ne serais pas du tout étonné que ces associations survivent au changement de génération. Par contre, l’accueil qui est réservé aux « jeunes » dans certaines autres associations peut décourager les bonnes volontés… Par « jeunes » je veux dire « nouveaux arrivants », quel que soit leur âge, par opposition à certains « pères fondateurs » qui ont fait de « leur » association une propriété privée…Pour elles, la survie sera certainement difficile, probablement impossible.


Selon vous, la réhabilitation et la conservation du patrimoine rural peuvent-elles contribuer à redonner vie à certains villages ?

   Rémi Couvignou : Sur le plan de l’animation, une association historique et culturelle forte et active, quelle que soit sa finalité, saura impulser la vie du village. Par expérience, j’affirme que toute initiative visant à fédérer les villageois autour d’un sujet permettant le retour sur leur histoire, leurs racines, sur les traces laissées par leurs ancêtres aura un effet immédiat.
Donc plutôt que de vouloir monter une association spécifique dans la seule intention de « sauver » « la chapelle » ou « le lavoir », mieux vaut associer toutes les forces vives dans une structure commune possédant plusieurs activités simultanées : Conservation de la chapelle ou du lavoir, bien sûr, mais aussi archéologie industrielle (les activités archéologiques « traditionnelles » étant réglementées), collection d’images (cartes postales, photos de famille), mémoire vive par enregistrement des souvenirs des Anciens, organisation d’expositions sur des thèmes locaux, collationnement et conservation de documents historiques, exploration des archives municipales, généalogie des familles locales, que sais-je encore ? Plusieurs centres d’intérêt, plusieurs activités donc plusieurs possibilités d’intéresser les habitants, de les faire collaborer à un ou plusieurs buts. Aujourd’hui le lavoir, demain la chapelle, et ensuite l’ancien moulin, l’ancienne gare et la voie de chemin de fer disparue, etc… Et cela permettra une entrée sereine de nouveaux arrivants (voir plus haut) qui sauront prendre la relève.


Vous disposez depuis peu d’un site internet (http://www.lagazette89.fr) Qu’attendez-vous de ce média et pensez-vous que l’essor d’internet puisse contribuer à mieux faire découvrir le patrimoine, voire à sensibiliser les internautes à sa sauvegarde ?

   Rémi Couvignou : J’ai ouvert ce site Internet pour compléter ma structure de commercialisation constituée par les librairies, les salons du livre locaux et la vente par correspondance. Je vends sur Internet mais je n’y fais pas « ma pub », car Internet est un media « passif : seule la personne qui cherche quelque chose le trouve, et personne ne cherche « de la pub ». La publicité utilise des medias « actifs » qui viennent au contact du prospect : presse en générale, mailings postaux, affichage, etc. Les messages directement publicitaires sur Internet (bannières, pop-ups, etc) sont d’un coût « au prospect » beaucoup trop élevé pour une entreprise comme la mienne, sont loin d’être fiables et sont surtout trop facilement bloqués par les systèmes « anti-pub ».
Le cas du patrimoine est différent, quoique l’on y retrouve l’opposition medias actif/passif : les associations de défense du patrimoine qui veulent divulguer leurs activités sur Internet doivent savoir que cela exige deux facteurs complémentaires d’égale importance : il faut créer un site efficace, informatif et surtout à jour (ce qui signifie investissement en compétences et en temps, donc en argent) mais il faudra surtout divulguer ce site par les moyens traditionnels. Car le seul fait « d’y être » ne changera probablement rien à leur situation actuelle. En effet, les amoureux du Patrimoine n‘ont pas attendu Internet pour s’en soucier et les indifférents ne tomberont jamais, même par hasard, sur un site du genre, puisqu’ils ne le cherchent pas. Par ailleurs, divulguer une initiative icaunaise dans les Bouches du Rhône ou chez les Chtis, c’est bien, mais qu’attend-on d’un Marseillais ? Une aide financière ? Il a « ses » chapelles à sauver… Et si l’on cherche « des bras », ceux-ci doivent être « locaux ». Internet est-il la meilleure solution pour parler à son voisin de palier ?


Propos recueillis le 3 janvier 2009  
         
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